Par Luisa María González.
Paris, 22 mai (Prensa Latina) »La France des Droits de l’Homme envoie-t-elle à l’Arabie Saoudite des armes qui peuvent être utilisées au Yémen? », demande un journaliste sur les réseaux sociaux en abordant l’un des thèmes les plus épineux de l’actualité de l’hexagone.
Dernièrement, le site d’investigation « Disclose » et Radio France ont révélé une information provenant des services de renseignement de l’Armée française selon laquelle les armes vendues par Paris à l’Arabie Saoudite et aux Émirats Arabes Unis étaient utilisées dans le conflit au Yémen, conflit dans lequel des dizaines de milliers de personnes -en majorité des civils- ont perdu la vie ces dernières années.
Dans l’inventaire divulgué, on rencontre des tanks Leclerc, des obus, des avions de chasse Mirage 2000-9, des radars Cobra, des blindés Aravis, des hélicoptères Cougars et Dauphin, des frégates Makkah, une corvette lance-missiles Bayunnah et des canons Caesar.
De l’avis des médias concernés par cette fuite, le gouvernement est tout à fait au courant de cette situation, car ce rapport des renseignements a été présenté le 3 octobre dernier lors d’un Conseil de Défense présidé par le président de la République, Emmanuel Macron.
À la suite de la divulgation de ce rapport, la seule réaction a été celle de la Commission Interministérielle pour l’Exportation du Matériel de Guerre dépendant du cabinet du premier ministre Édouard Philippe.
Selon cette Commission, les armes Françaises détenues par les pays de la coalition se trouvent uniquement en position défensive, pas sur la ligne de front.
« Nous n’avons aucune connaissance de victimes civiles résultant de l’utilisation de nos armes au Yémen », a déclaré la Commission. Mais peu d’observateurs, de spécialistes d’hommes politiques ou d’organisations sociales sont convaincus par ces explications.
Et malgré cette controverse, la France continue à livrer des armes à Riad. Par exemple, une commande 147 canons dont l’envoi s’étalera jusqu’en 2023.
À vrai dire, un navire d’Arabie Saoudite, le BahriYanbu, est arrivé au Havre pour prendre livraison de tout un arsenal.
Dans ses déclarations à la chaîne BFMTV, Florence Parly, la ministre de La Défense a dû admettre qu’un chargement d’armes aurait bien lieu mais qu’il s’agissait d’un contrat commercial devant être honoré ».
La ministre n’a offert aucune précision concernant cette cargaison et a répété qu´ « à la connaissance du gouvernement français, il n’existait aucun élément prouvant que les victimes du Yémen étaient dues à l’emploi des armes françaises sur le terrain ».
En plein milieu de cette polémique, la Direction de la Sécurité Intérieure a demandé des explications aux trois journalistes concernés- Geoffroy Livolsi et Matthias Destal, de « Disclose » et Benoît Collombat, de Radio France- sur leur rôle dans la divulgation d’une information qui aurait dû rester secrète.
En fait, a-t-on appris, une enquête est en cours contre ces journalistes qui sont accusés de « divulgation de secrets de défense nationale ».
En réaction, des journalistes issus de 37 médias français ont apporté leur soutien à leurs trois collègues dans une lettre rendue publique il y a quelques jours.
On peut y lire que les journalistes incriminés « ont seulement fait leur travail; c’est-à-dire qu’ils ont porté à la connaissance de leurs concitoyens des informations d’intérêt public sur les conséquences de la vente d’armes françaises ».
Les signataires font remarquer que, de plus, le document confidentiel en question invalide le discours officiel du gouvernement qui prétend que l’arsenal vendu « ne sert qu’à des fins défensives ».
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