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Les fonds des États-Unis pour les pays d’Amérique Centrale : aide ou un moyen de pression?

Par Diony Sanabia*

Washington, 20 octobre ( Prensa Latina) Presque sept mois après que le président des États-Unis, Donald Trump, ait donné l’ordre de suspendre l’assistance financière au Salvador, au Guatemala et au Honduras, le Gouvernement nord-américain a annoncé qu’il allait reprendre son aide.

À la fin du mois de mars dernier, Trump avait accusé ces pays du Triangle Nord d’Amérique Centrale, ainsi que le Mexique, de ne pas en faire suffisamment pour freiner le flux de migrants se dirigeant vers la frontière sud des États-Unis.

Le chef de la Maison Blanche a accompli ses menaces: il a coupé les fonds de Washington et a utilisé la mesure comme moyen de pression pour parvenir à ses fins et diminuer l’arrivée des migrants à la frontière.

Pour les membres de l’Exécutif, cette démarche du président est une manière d’exiger des efforts supplémentaires de la part des pays mentionnés afin qu’ils découragent les migrants et les empêchent de se rendre aux États-Unis, ce qui est l’un des objectifs de la politique migratoire, si controversée, du mandataire républicain.

Plusieurs spécialistes considèrent que la suspension de l’aide nord-américaine ne ferait qu’aggraver les conditions de vie et la violence dans les pays concernés et pousserait donc leurs habitants à partir en plus grand nombre, argument souvent repris par les élus démocrates.

« Jusqu’à ce que nous traitions cette misère à la racine dans les pays qui en sont victimes -misère dont les États-Unis sont responsables- nous continuerons à voir des migrants venir chez nous pour y chercher désespérément un refuge », a écrit le sénateur Tom Carper sur compte Twitter.

Pour sa part, Debbie Mucarsel-Powell, membre de la Chambre des Représentants, qualifie cette mesure d’erreur grave du président et de son administration.

« Couper les fonds pour le Guatemala, le Honduras et le Salvador ne fait qu’exacerber les problèmes à la frontière. Au contraire, les États-Unis doivent prendre la tête d’un mouvement pour aider ces pays et leur porter soutien afin de soulager la pauvreté et la violence chez eux et non quitter les lieux lorsque la crise empire », estime la députée.

Depuis cette décision de Trump, le temps s’est écoulé et, le 16 octobre dernier, le secrétaire d’Etat, Mike Pompeo,  a demandé à ses services d’informer le Congrès que l’assistance aux pays du Triangle Nord d’Amérique Centrale allait être renouvelée.

« Grâce à la politique du président et à la réponse de ces pays, la situation a largement progressé. Les accords de coopération en matière d’asile que nous avons récemment signés en sont un exemple », a déclaré Pompeo.

Il a souligné que le financement fourni par les États-Unis faisait partie des efforts conjoints pour parvenir à réduire l’immigration illégale  en provenance des trois pays concernés.

Ces fonds, a-t-il ajouté, complèteront les plans de sécurité de chaque administration nationale; ils augmenteront les actions dans le secteur privé pour créer des opportunités économiques; ils encourageront le développement institutionnel et permettront de faire tout ce qui, d’après Washington, doit être fait par un bon gouvernement.

Le 25 septembre dernier, Washington a passé un accord avec le Honduras pour freiner l’arrivée de migrants après avoir fait la même chose avec le Salvador cinq jours auparavant et avec le Guatemala en juillet dernier.

Étaient présents à la signature du dernier accord Kevin McAleenan, le secrétaire nord-américain en fonction à la Sécurité Nationale -celui-ci devant quitter prochainement ce poste- et le chancelier hondurien, Lisandro Rosales.

Selon McAleenan, « pour résoudre la crise à la frontière sud des États-Unis, il faut travailler avec nos voisins dans la région » et « le Honduras est un excellent partenaire ».

Sans aller jusqu’à qualifier le Honduras de « pays sûr », le texte de l’accord indique que Washington et Tegucigalpa s’engagent à renforcer les mesures de protection envers les personnes les plus vulnérables et à faire leur possible pour qu’elles ne deviennent pas victimes du trafic humain.

En plus de ces accords avec les pays du Triangle Nord, les États-Unis en ont signé un autre avec le Mexique, toujours  pour faire face à l’immigration illégale, et dont l’application a réduit le phénomène, comme l’a reconnu Marcelo Ebrard, le ministre des Affaires Étrangères mexicain, à Washington, en septembre dernier.

Lors d’une conférence de presse tenue à la suite d’une réunion avec Mike Pence, le vice-président nord-américain, le même Ebrard a affirmé que la stratégie du Mexique avait fait baisser considérablement le flux des immigrants afin qu’il corresponde aux normes établies par loi.

C’est d’ailleurs à la suite de cette réunion à la Maison Blanche -réunion à laquelle participaient également Pompeo et d’autres fonctionnaires- que l’accord migratoire avec le Mexique a été signé.

Cependant, après un délai de 90 jours, Washington se réservait le droit de reprendre ses menaces de taxation des produits mexicains importés par les États-Unis, ce qui a exercé une pression certaine sur leur voisin.

Comme prévu par l’accord, le Mexique acceptait à la fois d’accueillir sur son territoire les demandeurs d’asile pendant que les États-Unis analysaient leur demande et de déployer les effectifs de sa Garde Nationale à ses frontières nord et sud.

Un peu plus d’une semaine avant l’annonce de Pompeo, l’administration de Trump avait indiqué que l’année prochaine elle présenterait un plan destiné à la croissance économique du Honduras, du Guatemala et du Salvador.

Mauricio Claver-Carone, assesseur de la Maison Blanche pour la sécurité nationale chargé de l’Amérique Latine, a annoncé cette nouvelle par téléphone à des journalistes.

Selon lui, la plupart des migrants d’Amérique Centrale parvenant à la frontière des États-Unis émigrent pour des motifs économiques et non parce qu’ils sont victimes de persécutions politiques; ils abusent donc du droit d’asile.

Les raisons politiques invoquées ne sont, en fait, qu’un moyen pour entrer illégalement en Amérique du Nord. Mais dorénavant, tout cela est terminé, a indiqué le conseiller sans offrir le moindre détail sur le plan économique prévu par Washington pour l’année prochaine.

Selon les chiffres officiels pour 2019, presqu’un million d’immigrants illégaux ont été arrêtés le long de la frontière sud des États-Unis.

Si l’on compare ce chiffre -qui correspond à la période allant du 1er octobre 2018 au 30 septembre 2019- au nombre d’immigrants arrêtés pour la même période l’année précédente, l’augmentation est de 88 pour cent.

Aucun système de migration n’est en mesure de gérer une telle quantité d’immigrants a déclaré Mark Morgan, le chef par intérim de l’Office des Douanes et de la Protection Frontalière, lors d’une conférence de presse donnée le 8 octobre à la Maison Blanche.

Ce chiffre, a-t-il précisé, est le plus élevé des 12 dernières années et il s’explique par le grand nombre d’arrestations de personnes venant d’Amérique Centrale pendant les mois de mars, avril et mai de cette année.

De plus, a-t-il poursuivi, quelques 150 mille migrants ont réussi à traverser la frontière sans être interceptés par les autorités nord-américaines, et ce, en dépit de tous les contrôles existants.

Depuis son arrivée au pouvoir, le 20 janvier 2017, Trump a encouragé plusieurs types de mesures pour freiner l’immigration illégale, et même légale, vers les États-Unis sans tenir compte des nombreuses critiques -au niveau national comme international- de sa politique.

Peo/arb/dsa

* Correspondant de Prensa Latina aux États-Unis.

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