Par Pierre Lebret (*)
Paris, 27 août (Prensa Latina) Le président du Mexique, Andrés Manuel López Obrador, n’est pas un adepte des tournées internationales. Au début de son mandat, il n’a pas non plus manifesté un grand intérêt pour les relations extérieures, affirmant que « la meilleure politique étrangère est la politique intérieure ». Un sens honorable des priorités.
Mais avec son ministre des Affaires Étrangères Marcelo Ebrard, AMLO a réussit depuis 2019 à mettre en place une diplomatie active et davantage tournée vers l’Amérique latine et les Caraïbes, un véritable contraste avec ses prédécesseurs.
Ces dernières années, lorsque les forces obscures ont dominé la région, les membres du Palais national et du bâtiment Tlatelolco ont joué un rôle clé pour restaurer des espoirs intégrationnistes et contribuer à la stabilité politique et la solidarité régionale.
Depuis Hugo Chávez, l’Amérique latine n’avait pas de gouvernement aussi volontariste. Plusieurs moments marquent la gestion diplomatique actuelle du Mexique : depuis le rôle joué durant les moments de tension suivant le coup d’État en Bolivie, en novembre 2019, en offrant l’asile au président Evo Morales, évitant ainsi une tragédie majeure.
Tout comme la solidarité exprimée à Cuba en dénonçant à maintes reprises le blocus nord-américain et en envoyant une aide humanitaire pour soutenir la plus grande des Antilles face à la pandémie.
En ce qui concerne le Venezuela, alors que certains mandataires de droite pensaient obtenir des résultats avec des intentions douteuses, comme lors du ‘show’ de Cúcuta, Andrés Manuel López Obrador a toujours défendu le principe de l’autodétermination des peuples. Il a ensuite récemment offert sa coopération et son pays comme hôte afin que puissent se dérouler les négociations entre le gouvernement de Nicolas Maduro et l’opposition vénézuélienne. Le Mexique prend des risques en faveur du dialogue et la stabilité et renforce son leadership régional.
Pendant la crise pandémique actuelle de la Covid-19, le Mexique a également montré l’importance de l’approche intégrationniste, en mettant en œuvre, avec l’Argentine d’Alberto Fernández, un accord de production de vaccins prévoyant la distribution de 250 millions de doses contre le coronavirus dans la région.
Un travail commun qui se traduit par la capacité de nos pays à agir et à se fixer des objectifs face à des défis communs. Les gouvernements progressistes montrent une fois de plus l’exemple, la voie et l’importance de la coopération.
RELANCE DU DIALOGUE POLITIQUE RÉGIONAL
En matière d’intégration, traditionnellement, les efforts les plus forts ne viennent pas des géants du continent, mais cette fois la diplomatie mexicaine a réussi ce qui n’avait pas existé ces dernières années : elle a relancé le dialogue politique régional. Elle a donné un nouvel élan à la Communauté des États d’Amérique latine et des Caraïbes, qui avait été abandonnée par les gouvernements conservateurs de la région.
En regardant plus au sud qu’au nord, en neutralisant une OEA nuisible et discréditée, le Mexique ouvre une nouvelle étape pour l’intégration régionale. Toutefois, il sera essentiel de multiplier les mécanismes de participation avec et pour la société civile.
Si les peuples ne s’approprient pas les processus intégrationnistes, il est très difficile qu’ils les défendent lorsqu’il y a un changement de gouvernement et que la nouvelle autorité décide de s’en retirer. Sans la participation active des citoyens, les progressistes auront encore du mal à pérenniser les projets d’intégration dans une perspective émancipatrice pour l’Amérique latine et les Caraïbes.
Sortir de la crise actuelle passe par une intégration durable pour mettre en place des projets régionaux et, en définitive, une coopération renouvelée permettant de réduire les niveaux de pauvreté et d’inégalité. La région ne peut se permettre qu’à chaque fois que des gouvernements de droite arrivent des avancées significatives sur la scène régionale soient mises en échec.
Le Mexique met la main à la pâte, apporte sa vision et de la clarté. L’Amérique latine et les Caraïbes doivent suivre la dynamique engagée et comprendre qu’une région intégrée sera bénéfique à son développement, utile à ses peuples, indispensable aux générations futures. Le Mexique a de la magie, disait Chavela Vargas, cherchons la magie…
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(*) Politologue, spécialiste de l’Amérique latine, expert en coopération internationale