Par Martha Andrés Román *
Washington, 31 octobre (Prensa Latina) Diminuer le nombre de voyages des nord-américains à Cuba est l’un des objectifs fondamentaux de l’administration du président des États-Unis, Donald Trump, dans son offensive continue contre ce pays des Caraïbes.
Depuis l’élimination des voyages éducatifs de groupe « peuple à peuple » jusqu’à la toute récente décision de suspendre les vols des compagnies aériennes nord-américaines vers neuf aéroports cubains, les mesures employées pour restreindre les visites à Cuba ont été diverses.
Ces attaques de l’exécutif nord-américain ont commencé en juin 2017, lorsque, dans un discours délivré à Miami, en Floride, Trumpa annoncé qu’il allait abandonner le processus de rapprochement entamé par Barack Obama (2009-2017) et qu’il allait adopter des restrictions pour réduire les voyages et le commerce avec Cuba.
Durant le second mandat d’Obama -bien qu’il ait toujours été illégal pour les nord-américains de se rendre sur l’île en touristes- douze catégories de voyages avaient été quand même acceptées par le Département du Trésor et les visites vers l’île avaient augmenté de manière considérable.
Mais après l’allocution de Trump en Floride et la signature (le 9 novembre 2017) de son mémorandum présidentiel sur la politique des États-Unis envers Cuba, de nouvelles normes ont commencé à être mises en place interdisant les voyages éducatifs individuels dans le cadre des échanges de peuple à peuple.
À la même date, Washington a publié une liste d’entités et de sous-entités cubaines -des hôtels, des agences de voyage et des magasins dans tout le pays- avec lesquelles les nord-américains se voyaient interdire tout type de transactions.
Plus tard, le 5 juin 2019, l’administration Trump a également interdit les voyages éducatifs de peuple à peuple pour les groupes -et non seulement pour les individus-; à quoi s’est ajoutée une nouvelle mesure interdisant les embarcations de plaisance, publiques ou privées, ainsi que les paquebots de croisière et les yachts de se rendre dans l’île.
Le 25 octobre dernier, le département d’État et le département des Transports ont fait savoir qu’à partir du 10 décembre prochain les compagnies aériennes nord-américaines pourraient uniquement assurer les voyages vers La Havane et qu’en dehors de la capitale tous les autres vols -comme par exemple vers Villa Clara, Camagüey et Holguín- étaient suspendus.
Pour justifier cette dernière mesure, comme cela a été le cas pour les mesures antérieures, Mike Pompeo, le secrétaire d’État, a utilisé les mêmes arguments; à savoir, des violations supposées contre les droits de l’Homme et la solidarité de Cuba avec le gouvernement constitutionnel de NicolásMaduro au Venezuela.
Selon un communiqué du Département d’État, cette suspension des vols cherche à empêcher que le Gouvernement Cubain « ne se procure des devises grâce à l’argent dépensé par les voyageurs nord-américains logeant dans des centre touristiques appartenant à l’État ».
Par contre, le communiqué omet de mentionner qu’en plus de rendre plus difficiles les déplacements des nord-américains en dehors de La Havane, cette nouvelle mesure porte préjudice aux centaines de milliers de nord-américains d´origine cubaine qui viennent chaque année visiter leur famille et utilisent pour ce faire des compagnies aériennes comme American Airlines, JetBlue et Delta.
UN COUP PORTÉ AUX FAMILLES CUBAINES.
Ce véritable assaut de l’exécutif nord-américain contre les visiteurs se rendant sur l’île a été mené en dépit du soutien majoritaire existant entre les deux pays pour continuer le rapprochement bilatéral initié par l’administration précédente.
En effet, après que l’on ait connu la première série de mesures, en juin, des associations des deux partis, démocrate et républicain, ont présenté, dans les semaines suivantes, des projets de loi similaires à la Chambre des Représentants et au Sénat pour permettre aux citoyens nord-américains de se rendre librement sur l’île.
Ces projets, s’ils étaient votés, mettraient fin à toutes les restrictions de voyager et lèveraient tous les obstacles actuellement existant pour effectuer les transactions nécessaires à de tels voyages.
Le sénateur Patrick Leahy, qui a présenté un tel projet au Sénat, a rendu public un long communiqué, le 24 octobre, dans lequel il accusait la Maison Blanche et certains membres du Congrès de ne pas se soucier de l’impact de ces mesures administratives sur la population cubaine.
Il regrettait qu’au lieu d’encourager les nord-américains à visiter un pays voisin pour se rendre compte sur place de ce qu’était la société cubaine et construire des relations entre les deux peuples, Trump fermait la porte à toute visite.
Pour le sénateur Leahy, Donald Trump est conseillé -à la Maison Blanche, au Département d’État et au Congrès- par une poignée de nord-américains d´origine cubaine dont peut-être pas un seul n’a mis le pied à Cuba et qui prônent une ligne dure, ce qui explique pourquoi le président adopte une politique erronée et hypocrite envers Cuba.
Un jour à peine après la parution de ce communiqué, la Maison Blanche a annoncé sa nouvelle série de mesures pour restreindre le nombre de vols et plusieurs autres voix et organisations se sont élevées au Congrès pour critiquer à nouveau la politique du gouvernement républicain envers Cuba.
Le représentant démocrate du Massachussetts, James McGovern, a qualifié cette interdiction de vols de « truc stupide » et il a ajouté: « vouloir empêcher les citoyens nord-américains de voyager librement est une absurdité ».
« Nos désaccords avec le gouvernement cubain doivent être résolus par la diplomatie et le dialogue, sans faire appel à des restrictions obsolètes dignes de la Guerre Froide », a conclu McGovern.
Sa collègue, Barbara Lee, a déclaré sur son compte Twitter que ces interdictions de vol constituaient un nouvel effort de l’exécutif « pour détruire toutes les relations existantes entre nos deux pays. De telles mesures, rétrogrades et isolationnistes, ne peuvent que nuire aux cubains et aux nord-américains ».
Un autre législateur démocrate, Eliot Engel, président du Comité des Affaires Étrangères à la Chambre des Représentants, a qualifié la mesure d’inefficace car elle ne pourra que faire souffrir les cubains et leurs parents qui résident aux États-Unis. « Au lieu de limiter les vols vers Cuba, nous devrions soutenir le secteur privé qui est en train de naître sur l’île », estime-t-il.
De son côté, le président de Engage Cuba, James Williams, s’est exprimé conjointement avec d’autres organisations dans un communiqué selon lequel la nouvelle mesure de Maison Blanche n’a aucune portée et est inutilement cruelle pour les familles cubaines.
Comment imagine-t-on que les nord-américains d´origine cubaine vont pouvoir rendre visite à leurs êtres chers s’il n’existe plus de vols vers la plupart des villes du pays? Nous comprenons bien que les hommes politiques à l’origine de cette mesure n’ont jamais été à Cuba mais ils devraient au moins pouvoir comprendre que la grande majorité des cubains n’habitent pas dans la capitale, s’est-il indigné.
Dans cette même déclaration, Emily Mendrala, directrice exécutive du Centre pour la Démocratie dans les Amériques, souligne, elle aussi, que la mesure va également affecter les deux nations.
Une autre association qui regroupe de nombreux émigrés cubains, la Fondation pour la Normalisation des Relations entre les États-Unis et Cuba, est d’avis que la mesure cherche volontairement à rendre la vie plus difficile pour les cubains et accuse les conseillers aux Affaires Cubaines de Trump d’en être responsables.
La suspension des vols a été aussi critiquée par l’Alliance José Martì, une organisation formée par des cubains résidant à Miami, qui affirme que cette mesure, comme toutes les mesures prises par le gouvernement républicain, vise à rendre impossible le développement économique de Cuba.
peo/arb/mar
*Correspondante de Prensa Latina aux États-Unis.