Par Luis Manuel Arce Isaac
Mexique, 18 juillet (Prensa Latina) Le retour de l’ancien directeur de Petróleos Mexicanos (Pemex, compagnie étatique des pétroles du Mexique) Emilio Lozoya, extradé d’Espagne après avoir été fugitif de la justice mexicaine depuis l’année dernière, provoque une grande nervosité dans les milieux politiques proches de l´accusé.
Le fait est que Lozoya a déclaré depuis Malaga, où il était détenu en Espagne, qu’il aiderait le Bureau du Procureur Général de la République à faire la lumière sur de nombreux délits ayant porté un important préjudice non seulement aux finances du pays, mais également à son prestige.
Il y a une crainte évidente concernant ce que Lozoya révélera sur les pots-de-vin de l’entreprise brésilienne Odebrecht, l’achat frauduleux d’une usine d’engrais azotés, la fameuse Arnaque Maîtresse et tout ce qui concerne la réforme énergétique, conçue pour liquider Pemex et la Commission Fédérale de l’Énergie pour laisser le secteur aux mains des entreprises privées.
Les délits de Lozoya impliquent directement le gouvernement de l’ancien président Enrique Peña Nieto (2012-2018), du Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI); même si le précédent de Felipe Calderón (2006-2012) n’échappe pas à la vague anticorruption qui secoue le Mexique.
Genaro Garcia Luna, ancien titulaire du Secrétariat de la Sécurité Publique et bras droit de Calderón dans la guerre contre le trafic de drogue et les tâches de sécurité, est également en attente d’extradition.
Ce personnage, à qui on attribue plus d’une dizaine de délits financiers multimillionnaires, est en prison et fait face à un procès à New York pour des liens avec le cartel de Sinaloa ; procès lors duquel il est possible qu’il mentionne Calderón, bien que l’ex-mandataire essaie de prendre ses distances avec celui dont il était pourtant le seul patron.
Un autre personnage actuellement extradable est César Duarte, ancien gouverneur de Chihuahua pour le PRI qui a vidé les caisses les caisses de cet État (on lui reproche le vol de 54 millions de dollars), accusé d´enrichissement illicite, exercice abusif de fonctions, utilisation abusive de certains fidéicommis et passation de contrats de dette publique pour l’État.
Il est également accusé d’avoir détourné des ressources vers les fonds du PRI afin de financer ses candidats à des fonctions publiques.
Thomas Zeron, ancien secrétaire technique du Conseil de Sécurité Nationale et également extradable, est quant à lui accusé d’infractions financières et l´instigateur des mensonges concernant la mort des 43 étudiants d’Ayotzinapa, ironiquement connus comme ‘vérité historique’, pour protéger le cartel Guerreros Unidos, fait qui implique l´ancien président Peña Nieto.
Pour ce qui est de Lozoya, la peur qu´il révèle un certain nombre de faits atteint des dizaines de fonctionnaires, de politiciens et d’hommes d’affaires qui sont peut-être plus d’une centaine, dont certains font déjà des déclarations pour prendre leur distance avec l’accusé.
Dans le seul cas de l’Arnaque Maîtresse, lors de laquelle plus de 350 millions de dollars ont été versés dans des contrats illégaux, les sources du gouvernement fédéral assurent pouvoir prouver la participation de 11 organismes fédéraux, 8 universités, plus de 50 fonctionnaires et 186 entreprises.
Le sénateur de Morena (alliance de gauche actuellement au pouvoir), Ricardo Monreal, a déclaré que l’arrivée de Lozoya au Mexique provoque un ‘tremblement politique’ en raison de ce qu’il peut révéler sur la réforme énergétique de Peña Nieto et le Pacte pour le Mexique, lié à l’escroquerie.
L’actuel président Manuel López Obrador a abordé le sujet lors de sa conférence matinale et a assuré que ‘il est de notoriété publique qu’il y avait beaucoup de corruption au sein de Pemex’ durant le sexennat passé comme le montrent les affaires Odebrecht et les surprix dans divers achats, y compris celui de l’usine d’engrais susmentionnée.
Le seul membre du PRI qui a été visible hier est l’ancien président de la Commission de l’Énergie au Sénat, et principal artisan politique de la réforme énergétique, David Penchyna, qui a dit qu’il ne s´exprimerait pas avant d’avoir connaissance des détails de l´affaire.
L’ancien dirigeant de Pemex a reçu jusqu’à 9,15 millions de dollars de la société Odebrecht et 3,75 millions d’AHMSA pour l’achat de l’usine d’engrais à un prix de près de 500 millions de dollars, selon les documents du bureau du procureur.
Bien qu’il soit presque impossible de les séparer des quatre extradables, comme ils sont appelés ici, l´actuel mandataire López Obrador a réitéré son critère selon lequel il est plus avantageux de ne pas impliquer judiciairement les anciens présidents Calderón et Peña Nieto, mais que le plus important est de stigmatiser la corruption et le corrompu et non de les poursuivre en justice.
peo/npg/Lma