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Montevideo, (Prensa Latina) Avec la disparition de Daniel Viglietti, éminent musicien uruguayen, compositeur et guitariste, l’Amérique Latine et le monde perdent non seulement un artiste engagé mais aussi une personne irremplaçable. Il vivra à jamais dans notre mémoire.
Viglietti, qui était également journaliste, s’est éteint le 31 octobre, à la veille de ses 78 ans, dans sa ville natale de Montevideo, victime d’une rupture d’anévrisme selon les informations rapportées par la presse.
La nouvelle a tout de suite provoqué surprise et douleur. Il est difficile de ne pas se sentir désemparé quand on s’aperçoit soudain que l’ami, le compagnon, et aussi -pourquoi pas- le révolutionnaire qui utilisa sa voix et sa guitare pour défendre les opprimés et la cause des peuples, nous a définitivement quittés.
Ses chansons furent les hymnes qui accompagnèrent les luttes des mouvements populaires de gauche pendant les années 60 et 70 du siècle dernier.
De cette époque resteront éternellement gravés dans notre mémoire des albums tels que » Chansons pour un homme nouveau » (1968), « Chansons pour mon Amérique (1968), « Chant libre » (1970), « Chansons de travers » (1971) et « Tropiques »(1973).
Jusqu’au dernier moment, son engagement auprès des causes justes et solidaires a été indéfectible, comme les journalistes de Prensa Latina ont pu le constater chaque fois qu’ils l’ont côtoyé ou ont eu le privilège de participer avec lui à des actions de solidarité en faveur de Cuba et du Vénézuela.
De même, il a assisté à toutes les célébrations en l’honneur de Mario Benedetti, cet autre grand monsieur des Lettres, d’origine uruguayenne comme lui, et a toujours donné de sa présence dans toutes les foires du livre ou autres manifestations consacrées de près ou de loin à la culture.
Lorsque l’auteur de « La Trêve » célébra son 95ème anniversaire, Viglietti déclara à Prensa Latina que cet inoubliable ami, par son seul exemple, lui avait donné « d’innombrables leçons d’éthique et d’esthétique ».
« Et en effet », ajouta-t-il, « pour les jeunes générations d’uruguayens et de latino-américains, les œuvres de Mario, sous leurs diverses formes, continuent à renaître et à nous jeter un défi pour trouver des interprétations différentes de celles qu’imagina la plume de leur auteur. »
Ces paroles pourraient être appliquées au propre Daniel Viglietti dont les chansons, depuis des dizaines d’années résonnent à Buenos Aires, à La Havane, à Managua, à Paris ainsi que dans tant de pays d’Amérique Latine et du reste du monde.
Sa passion pour Cuba fut de toujours et pour toujours. Elle naquit en écoutant les discours des barbus de la Sierra Maestra et fut renforcée en 1967, quand il visita Cuba pour la première fois, puis lors de son voyage de 1972, quand il participa aux Rencontres de la Chanson Latino-Américaine, ainsi que lors de nombreuses visites ultérieures.
Son amitié avec les grands de la « troba cubana » part de là. Elle est à l’origine du disque qu’il produisit avec Silvio Rodriguez, Pablo Milanès, Noel Nicola et Vicente Feliù : « Daniel Viglietti et le Groupe d’Expérimentation Sonore du ICAIC ».
De son séjour à Cuba en 1967, il disait: « Ce voyage transforma notre vie de fond en comble. Nous rentrâmes chez nous changés. Nous étions complètement convaincus que la Révolution pouvait se faire dans notre propre langue, en respectant nos propres particularités ».
Mais c’est en 1989 que Cuba marqua Viglietti définitivement, le jour où Fidel Castro épingla sur sa poitrine la médaille » Hadeé Santa-Maria ». « Un infime honneur pour moi » nous confia-t-il.
Le 8 octobre 2014, il fut également le premier artiste à recevoir le prix » Noel Nicola » dans la Maison des Amériques. « Je me sens plus qu’honoré », furent ses mots en l’acceptant.
Il y a un peu moins d’un an, en apprenant le décès du chef historique de la Révolution cubaine, Viglietti déclara: » Malgré son âge avancé et la vie pleine qu’il a vécue la disparition de Fidel Castro nous touche au plus profond de nous-mêmes.
« Il va nous manquer mais nous allons essayer de transformer cette perte inestimable en un principe actif qui nous permettra d’aller de l’avant ».
Daniel Viglietti mérite le même éloge.
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