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La Havane, (Prensa Latina) Les traditionnelles allégations au sujet de liens entre la France et le génocide de 1994 au Ruanda sont réapparues avec une force inhabituelle en cette fin d´année par le biais d´accusations basées sur une étude du cabinet d´avocats étasunien Cunningham Levy Muse.
Un rapport du groupe, dont le siège se trouve à Washington, diffusé par Kigali mi-décembre, implique directement Paris dans le massacre de plus d´un million de tutsis et hutus, les ethnies en conflit lors de cette période fatale de cent jours qui a saigné le pays africain et fait frémir le monde entier.
L´étude du buffet étasunien, réalisée durant six mois sur une commande officielle du petit pays, et basée sur de nombreuses sources, accuse la France d´avoir fourni de l´armement de guerre et une formation technique aux forces ruandaises, dont la préparation a contribué à l´extermination de la minorité tutsi.
Selon l´enquête, qui aggrave le croissant différent entre le pays européen et celui d´Afrique Orientale, dont le président, Paul Kagame, a retiré son ambassadeur de Paris quelques jours auparavant, les personnes impliquées appartenaient au gouvernement français de l´époque, du président François Mitterrand, et ont facilité une protection aux auteurs des massacres.
Cunningham Levy Muse a présenté des preuves pour démontrer la prétendue complicité française avant, pendant et après l´holocauste, effectué par des extrémistes de l´ethnie hutu à l´encontre des tutsis et de groupes hutus modérés, lors duquel la majorité des victimes ont été attaquées à la machette.
Le rapport du cabinet nord-américain souligne que « les officiers français étaient conscients et ont appuyés les actions et les objectifs du gouvernement (ruandais) de Juvenal Habyarimana et des criminels qui se sont emparés du pouvoir au début du génocide contre les tutsis » dans le dénommé Pays des Mille Collines.
Cunnigham Levy Muse évoque également, en y apportant des arguments, des actions de protection française accordée à des personnes soupçonnées de crime massif et d´obstruction aux tentatives de les traduire en justice. Et ce en plus du fait que Kigali a toujours fait valoir le refus de la France de faciliter une grande partie des documents de l´époque en son pouvoir, dont des archives classées secret-défense.
La ministre des Relations Extérieures du Ruanda, Louise Mushikiwabo, a jugé que le document « mets à nu la conduite de fonctionnaires français » lors des années 90, durant lesquelles les crimes ont eu lieu, alors que la chancellerie française a exprimé « prendre note » du rapport du cabinet.
« En 2016, le gouvernement de Kigali a demandé à celui de Paris une autorisation pour interroger 22 officiers français, impliqués dans les faits s´étant produits dans le pays africain en 1994, mais n´a jamais reçu de réponse », a signalé la titulaire ruandaise.
Paris a officialisé par un communiqué son engagement à « poursuivre par la voie judiciaire ceux qui ont participé aux massacres ruandais », et a rappelé que la France a déjà condamné plusieurs personnes et étudie d´autre cas. Bien que si Paris fasse ce choix, elle devra commencer par des centaines de ruandais, résidents en France et fugitifs, impliqués dans ce génocide.
Le Ruanda a publié en 2016 une liste de hauts officiers français accusés d´avoir coopéré lors de la planification et l´exécution du génocide. Y figurait le général Jacques Lanxade, chef de l´État Major français entre avril 1991 et septembre 1995, période lors de laquelle ce tragique épisode, l´un des plus violents de la région des Grands Lacs, s´est déroulé.
En novembre dernier, le gouvernement de Kigali a déclaré qu´il consacrerait ses efforts à « enquêter en profondeur la responsabilité des fonctionnaires français quant au génocide », ce qui a depuis un peu plus refroidit les liens bilatéraux entre les deux nations.
Les massacres de 1994 ont également éveillé des critiques au sujet d´une inadéquate et insuffisante gestion de la crise par l´ONU, un scandale qui a depuis compromis la France, et y compris les États-Unis dont le gouvernement en ait sorti indemne, apparemment grâce à d´ultérieures négociations avec le gouvernement de l´actuel président, Paul Kagamé.
Depuis Paris, des médias ont informé que des enquêteurs locaux ont rouvert le dossier d´un avion, d´équipage français, qui a été abattu par un missile au-dessus de la capitale du Ruanda et dans lequel est décédé le président du pays de l´époque, Juvenal Habyarimana, d´origine hutu, ainsi que celui du Burundi, Cyprien Ntaryamira.
Ce double homicide, dont les leaders hutus ont accusé la minorité tutsi d´en être responsable, à été le détonateur du massacre ruandais, bien que cette attaque ait laissé de nombreux points d´interrogation et soit toujours en cours d´enquête.
La France a toujours nié ses liens avec le génocide, qui impliquaient notamment la livraison d´armes malgré l´embargo existant, tout en sachant que les tutsis étaient une ethnie minoritaire violemment attaquée par la majorité hutu alors au pouvoir, mais en 2010, le président français de l´époque, Nicolas Sarkozy, a admis qu´il « y a eu de graves erreurs de jugement ».
Le controversé président Kagamé, réélu lors des élections présidentielles le 4 août dernier avec 99 pour cent des scrutins exprimés, avait à l´époque était accusé d´être l´un des responsable de l´attentat contre cet avion, mais il a ensuite été exonéré de toutes charges.
*Journaliste de la Rédaction Afrique et Moyen-Orient de Prensa Latina
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