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Une présidente latino-américaine pour l’Assemblée Générale de l’ONU

Par Ibis Frade*

Nations Unies, 18 juin (Prensa Latina) La chancelière équatorienne, Maria Fernanda Espinosa, deviendra bientôt la première femme latino-américaine à présider l’Assemblée Générale de l’ONU après avoir été élue ce mois-ci par 128 voix.

Grâce à ce soutien, elle pourra prendre ses nouvelles fonctions dès septembre prochain. Elle deviendra alors la première latino-américaine à occuper le poste de présidente du plus grand organisme des Nations Unies, poste actuellement occupé par le diplomate slovaque Miroslav Lajcak.

Bien que cette équatorienne se soit lancé dans la course à la présidence de l’Assemblée il y à peine quelques mois, sa candidature a donné lieu à beaucoup de frictions avec le Honduras – dont le candidat avait postulé bien avant – mais, finalement, l’expérience et la maitrise avec lesquelles Espinosa a dominé le dialogue interactif qui s’est déroulé au mois de mai ont fini par convaincre beaucoup de pays membres.

Maintenant, le processus de transition a commencé et Espinosa entrevoit déjà les défis et les priorités qui l’attendent pendant cette 73 ème période de sessions.

Dans un entretien exclusif accordé à Prensa Latina, la chancelière équatorienne nous a assurés que des sujets comme la parité des genres et le partage du pouvoir entre hommes et femmes seront certainement prioritaires sur son agenda.

L’une de mes responsabilités, pendant la prochaine série de sessions, sera de faire en sorte que le partage du pouvoir politique et économique entre hommes et femmes devienne une constante dans tous les emplois, a-t-elle insisté.

C’est pour moi un honneur et un privilège que d’être la première présidente latino-américaine de l’Assemblée Générale, mais c’est également une grande responsabilité: il est essentiel que nous autres, les femmes ayant un pouvoir décisionnel, nous nous engagions à fond sur ces sujets, a-t-elle déclaré.

“Il ne s’agit pas de faire uniquement ce que nous savons faire mais de prouver aussi que, dans les postes de pouvoir, nous pouvons faire la différence ».

De plus, ajoute-telle, le thème de l’égalité des genres doit imprégner toutes les affaires traitées par l’Assemblée Générale, même s’il y a aussi parfois des débats spécifiquement sur ce sujet; l’important est qu’il soit présent, et en permanence, dans tous les esprits.

Il est prouvé que parmi les sections de la population les plus vulnérables lorsqu’il y a des conflits se trouvent les femmes et les fillettes; nous devons donc assurer leur protection.

Espinosa a quand même tenu à souligner que, maintenant,  l’Équateur a le privilège de représenter tous les pays d’Amérique Latine et des Antilles pendant cette 73ème série de sessions, ce qui est, en soi-même, un grand défi.

La personne qui se trouve à la tête de l’Assemblée Générale doit diriger, mener et coordonner le travail des 193 États membres de l’ONU or il est clair que certains des thèmes particuliers à notre partie du monde coïncident avec les thèmes prioritaires que nous devrons traiter pendant cette 73ème série de sessions, a-t-elle fait remarquer.

C’est par exemple le cas avec l’agenda 2030 et le respect des Objectifs pour un Développement Durable.

Plusieurs de ces points, précise-t-elle, seront prochainement évalués; par exemple la capacité des économies à créer des emplois suffisants et qui permettent de vivre convenablement, en particulier les emplois mis à la disposition des jeunes.

Une autre des questions à analyser et qui  présente un intérêt vital pour l’Amérique Latine et les Antilles, est l’accès à éducation de qualité, surtout pour les petites filles et les adolescentes car il existe beaucoup d’inégalités dans ce domaine, estime Espinosa.

La construction de la paix et de la stabilité, tout comme la mise en place de nouveaux fondements économiques permettant le développement, sont aussi des priorités essentielles pour l’Amérique latine.

Or, ces problèmes de paix, de sécurité et de développement nécessitent une plus grande présence sur place de l’ONU. Celle-ci doit donc être mieux connectée avec les lieux où opèrent ses équipes.

L’exemple donné à ce sujet est celui des représentants permanents de l’ONU dans les bureaux nationaux de l’organisation.  Ces permanents-résidents devraient être en contact direct avec les Nations Unies afin de communiquer leurs rapports dans les plus brefs délais, ce qui serait une amélioration considérable permettant aux agences de l’organisme multilatéral d’adapter ses réponses aux nécessités ressenties sur le terrain.

Pour en arriver là, il faudra cependant  attendre la fin du processus de négociations. Ce n’est qu’ensuite que l’Assemblée Générale de l’ONU pourra accompagner, impulser et faciliter l’application de toutes ces transformations, nous a-t-elle expliqué.

Une autre réforme qui n’a pas encore été abordée mais que de nombreux d’États  membres de l’ONU attendent avec impatience est la réforme du Conseil de Sécurité. Voilà plus de 20 ans que beaucoup souhaitent cette réforme, rappelle la chancelière équatorienne, mais les choses avancent très lentement.

Il y a 10 ans, on adopta une résolution à ce sujet pour que les gouvernements s’entendent entre eux et fassent évoluer la situation. Qu’en est-il advenu? il faudra procéder à une évaluation des progrès accomplis  depuis cette résolution ainsi que de la profondeur et de la vitesse des actions menées dans ce domaine, prévoit-elle.

Mais tout ceci dépend de la volonté politique des États. Le rôle de la présidente de l’Assemblée est seulement de faciliter et d’accompagner les projets. L’allure et le rythme des réformes dépendent entièrement de la volonté des 193 pays membres, insiste-t-elle.

Les mesures en faveur du climat adoptées lors de l’Accord de Paris, figureront aussi en bonne place parmi les priorités de cette 73 ème série de sessions. Déterminer ce qui a été accompli et ce qui reste encore à faire est d’une nécessité vitale pour les petits États insulaires, comme le sont de nombreux pays des Antilles.

De même, le Pacte Global pour une Migration Sûre, Ordonnée et Régulière est fondamental pour la zone latino-américaine; et Espinosa, qui est encore ministre des Affaires Étrangères de l’Équateur, espère que ses négociations pourront aboutir et que le pacte sera finalement adopté en décembre.

La question palestinienne, qui dure depuis des dizaines d’années, est un autre problème pour lequel la chancelière aimerait faire bouger les lignes. Mais, là aussi, il faudrait davantage de volonté politique de la part des états membres. Selon elle, cette affaire a été souvent traitée par le Conseil de Sécurité et par l’Assemblée Générale; des dizaines de résolutions ont été adoptées;  le grand défi est de parvenir à les faire appliquer.

Là aussi, la volonté politique de la majorité des pays est insuffisante pour résoudre ce problème et, sans cette volonté, il sera impossible de trouver une solution.

Changement climatique, migration, affaire de la Palestine restent à l’ordre du jour, résume-t-elle.

En réponse à la question de Prensa Latina sur la réduction par les États-Unis de l’allocation à l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés palestiniens, la chancelière répond que “les  questions financières sont le reflet des priorités politiques”.

À son avis, la situation des réfugiés palestiniens, et celle de millions d’autres réfugiés de par le monde, continue à être l’une des priorités de l’ONU. Tous les États sont co-responsables de ce problème. C’est ensemble qu’ils doivent trouver des solutions.

Il en va de même, affirme-t-elle, pour le Pacte Global pour une Migration Sûre, Ordonnée et Régulière qui doit servir de cadre de référence et doit garantir les droits de l’homme pour toute personne se déplaçant d’un pays à un autre.

Dans l’ensemble, tout indique que le processus de négociations intergouvernementales au sujet de ces trois piliers de la réforme de l’ONU trouvera sa conclusion durant cette série de séances de l’Assemblée Générale, sauf, bien sûr, s’il surgit un désaccord majeur sur les thèmes concernés. Il faudrait alors s’attendre à ce que ce processus prenne un peu plus de temps, mais, déclare Espinosa,  nous espérons que cela ne sera pas le cas.

La ministre des Affaires Etrangères de l’Équateur, qui a aussi été la première femme ambassadrice de l’Équateur auprès des Nations Unies et a également occupé ce poste à Genève, a plus de 20 ans d’expérience internationale. Elle a aussi de l’énergie à revendre.

Cependant, elle va occuper ce poste de présidente de l’Assemblée Générale à un moment particulièrement critique où le  manque de consensus est au plus bas et où les conflits sont en nette augmentation sur notre planète.

* Correspondante en chef de Prensa Latina aux Nations Unies.

peo/rr/ifb

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