Quito, 10 octobre (Prensa Latina) Le Bureau du Défenseur du Peuple de l’Équateur a confirmé aujourd’hui la mort de cinq personnes, dont un dirigeant autochtone, à la suite de huit jours de protestation nationale contre les mesures décidées par le Gouvernement.
Dans un communiqué, l’instance a présenté ses condoléances et exprimé sa solidarité avec les familles du leader de la Confédération des Nationalités Indigènes (Conaie) dans la province de Cotopaxi, Inocencio Tucumbi, et des autres personnes décédées, dont les noms n’ont pas été précisés.
«Nous appelons le gouvernement à éradiquer la violence et à garantir le droit à la protestation sociale de manière pacifique », a précisé l’entité.
Le Bureau du Défenseur du Peuple est l’une des instances qui a dénoncé la répression policière enregistrée dans ce pays sud-américain au cours des marches qui ont eu lieu sur tout le territoire national, en rejet des réformes fiscales et du travail annoncées le 1er octobre dernier.
Dans un rapport issu du suivi de la situation depuis huit jours, lorsque les manifestations ont commencé, l’institution a demandé au Gouvernement national d’abroger l’état d’urgence décrété au niveau national, étant donné que la mesure n’a pas été efficace.
À son avis, cette déclaration n’a fait qu’aggraver la spirale de la violence dans plusieurs régions du pays et entraver le retour au calme.
Les décès résultant des mobilisations ont été signalés plus tôt par la Conaie, qui s’est déclarée en deuil et a annoncé qu’elle publierait dans les prochains jours un rapport complet sur les morts, les blessés et les disparus, face à la dissimulation d’informations par les autorités et certains médias.
La représentation des peuples et des nationalités a commencé cette journée de protestation par des cérémonies pour honorer les défunts et a confirmé rester en lutte, tout en tenant le gouvernement pour responsable de la violence qui se déchaîne dans tout le pays.
Depuis le 3 octobre dernier, date à laquelle est entré en vigueur le décret 883 qui a supprimé l’allocation pour l’essence supplémentaire et le diesel (entre autres réformes préjudiciables pour les personnes à faible revenu), les autochtones, les travailleurs, les étudiants universitaires et le peuple en général restent dans les rues.
Pour les manifestants, les décisions gouvernementales répondent aux pressions du Fonds Monétaire International (FMI) en échange de prêts de plusieurs millions de dollars à l’Équateur, ce qui entraînerait une augmentation de l’endettement et de la pauvreté.
La Conaie avait publié plutôt dans la matinée que ‘c’est avec une profonde douleur et une profonde indignation que nous faisons savoir à l’Équateur que lors de la répression effrénée et brutale du mercredi 9 octobre contre le Mouvement Indigène, guidée par les politiques répressives du gouvernement de Lenín Moreno, de sa ministre du Gouvernement, Maria Paula Romo, et du ministre de la Défense, Oswaldo Jarrín, nous confirmons qu’il y a des compagnons qui ont perdu la vie’.
La Confédération a manifesté coordonner ses activités avec diverses organisations de défense des droits de l’Homme afin de poursuivre les processus nécessaires et pertinents pour que « ce crime contre l’humanité ne reste pas impuni ».
La dénonciation de la Conaie et du Défenseur du Peuple réduisent à néant les déclarations faites par la ministre du Gouvernement, qui, lors d´un bilan des journées de marches contre les réformes fiscales et syndicales décidées par l’exécutif, a affirmé qu’il n’y avait pas de morts liées aux affrontements enregistrés entre les mobilisés et les forces de l’ordre.
La direction de la Conaie a également réfuté hier les déclarations du vice-président de la nation, Otto Sonnenholzner, sur des prétendus pourparlers entre l’organisation et le gouvernement.
‘Le Mouvement autochtone dément le vice-président de la République @ottosonnenh qui assure que se tient un dialogue avec les dirigeants au sein de l’ONUecuador’, a assuré la Conaie dans un message diffusé sur le réseau social Twitter.
La Conaie a ainsi réagi en démentant les déclarations du vice-président, tenues depuis Guayaquil, où la présidence de la République a été temporairement déplacée, et dans lesquelles il avait même assuré qu´il y avait des avancées lors des dialogues.
Lors de ses déclarations sur une chaîne nationale, Sonnenholzner avait y compris affirmé que l’un des résultats était l’engagement de manifestations pacifiques.
Jaime Vargas, président de la Conaie, a assuré hier qu’ils restaient fermes dans la décision de dialoguer, seulement après que l’administration nationale ait abrogé ledit décret 883, qui a notamment provoqué une hausse des tarifs des transports publics et des prix alimentaires du panier de base.
Avant le début de la grève, Vargas avait précisé qu’il y avait eu un rapprochement avec l’Organisation des Nations Unies, instance à laquelle il a été demandé uniquement d’être garant des droits de l’Homme et de déloger les Forces Armées des points où les peuples autochtones luttent.
Mais depuis, en début d´après-midi, la Conaie s’est déclaré en résistance nationale contre les mesures économiques décidées par le gouvernement et la répression policière déclenchée par cette semaine de manifestations.
L’organisation a rendu publique cette détermination dans un communiqué signé par Jaime Vargas, qui a annoncé la décision en assemblée en présence de centaines de membres de communautés ancestrales.
« Nous avons vécu des jours de grande agitation, nous avons été surpris par notre propre capacité de lutte et de résistance et nous avons montré au monde que le mouvement indigène et le peuple équatorien sont un seul (…). Notre parole est là : cela ne s’arrêtera pas tant que le FMI (Fonds monétaire international) n’aura pas quitté l’Équateur », a-t-il affirmé.
Le texte signale que l´Exécutif, dont le président Lenín Moreno est à la tête, a répondu à nos demandes par la violence, la répression, en traitant le peuple comme un ennemi et sans respect pour les zones de secours humanitaires, attaquées au gaz lacrymogène.
Il y est également dénoncé l’interdiction de créer des couloirs humanitaires pour le transport des blessés dans les hôpitaux lors de la réaction répressive des forces de l’ordre, au moyen de bombes lacrymogènes, d’armes à feu et de coups de matraques, entre autres, ce que cette organisation considère comme un massacre.
« Ce que l´on vit dans ce pays n’a pas de nom. Il n’y a aucun souvenir dans l’histoire récente, d’une répression aussi atroce et violente sur le peuple qui réclame ses droits », a déclaré la Confédération.
Dans ce contexte, elle avertit que la lutte n’est pas uniquement pour aujourd’hui ou seulement contre la libération des prix de l’essence et du diesel, mais « pour empêcher que l´on nous hypothèque l’avenir et que nous aillons à payer par la faim et la pauvreté, de deux et trois générations, ce que nous n’avons pas freiné à temps aujourd’hui ».
La Conaie a confirmé qu’il n’y aura pas de dialogue avec l’exécutif national tant qu´il n’aura pas rempli les conditions minimales de révocation de la ministre du Gouvernement, Maria Paula Romo, du titulaire de la Défense, Oswaldo Jarrín, et d’abrogation du décret 883.
« L’appel aux bases et au peuple est de maintenir et de renforcer la lutte contre ce paquet de mesures et la répression violant le droit à la mobilisation », signale la Confédération indigène.
Par ailleurs, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a reçu aujourd´hui une demande du gouvernement équatorien pour faciliter le dialogue avec différents secteurs de la société civile, a déclaré son porte-parole adjoint, Farham Haq.
Guterres est préoccupé par les événements récents en Équateur et rappelle le droit de réunion pacifique des citoyens, a déclaré le porte-parole au sujet des protestations.
En outre, a-t-il ajouté, le Secrétaire général demande à tous les acteurs de réduire les tensions, d’éviter les actes de violence et de faire preuve de la plus grande retenue.
Le système de l’ONU et la Conférence Épiscopale soutiennent des discussions préliminaires avec les autorités et différents secteurs de la société civile pour réduire les tensions, a indiqué Haq.
De même, a-t-il poursuivi, l’ONU est prête à envisager un rôle de soutien au dialogue si toutes les parties concernées acceptent de s´engager.
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