La Havane, 14 novembre (Prensa Latina) A l’ère de la post-vérité, de nombreux lecteurs restent enfermés dans une boucle d’algorithmes et d’informations qui racontent l’histoire à leur manière, une déformation de la réalité qui est utilisée à Cuba pour tenter de subvertir l’ordre établi.
Des spécialistes des sciences sociales décrivent ces éléments comme faisant partie de la stratégie de guerre non conventionnelle, à laquelle s’ajoutent des outils comme le lynchage virtuel, les « fake news », la manipulation émotionnelle, la rupture institutionnelle et la création de leaders d’opinion.
Le dernier mouvement en ce sens a été l’appel à une marche pour le changement dans l’île, et pour exiger en outre la libération des personnes poursuivies pour les actes de vandalisme du 11 juillet dernier dans le pays.
Une manifestation est licite à Cuba quand elle ne viole pas les droits d’autrui et ne cherche pas à changer l’ordre établi, a souligné un spécialiste qui a qualifié d’anticonstitutionnel la nouvelle tentative de déstabilisation sociale.
Dans des déclarations à Prensa Latina, le membre de l’Union des juristes de Cuba, Yuliesky Amador, a cité plusieurs articles de la Constitution qui démontrent le caractère irrégulier de la convocation.
«Les organisateurs de cette action se retranchent derrière l’article 56 qui nous donne certainement à tous le droit de réunion, de manifestation et d’association à des fins licites et pacifiques, à condition qu’il soit exercé dans le respect de l’ordre public et du respect des préceptes établis par la loi», a-t-il noté.
Cependant, a-t-il ajouté, la convocation de cette marche pose parmi ses objectifs la libération des prisonniers qui ont été jugés et demande en outre de résoudre les différends par les voies démocratiques qu’ils estiment eux valables.
«Une manifestation à des fins licites et pacifiques ne peut ni porter atteinte à autrui, ni porter atteinte à la paix des citoyens, ni demander le renversement de l’ordre établi, ni un changement du système socialiste entériné dans la Constitution et son article 4», a-t-il souligné.
Amador a également cité l’article 45 de la Constitution, qui dispose que l’exercice des droits des personnes est limité par les droits d’autrui, par le bien-être général, par le respect de l’ordre public et des lois.
«On ne peut pas utiliser la Constitution contre la Constitution, se réfugier dans des articles biaisés comme s’il s’agissait de deux Grandes Chartes différentes», a-t-il précisé.
YUNIOR, SAÜL, CIA, YOUNGS et tant d’autres preuves…
En ce qui concerne la marche convoquée demain, le 15 novembre, le gouvernement de la nation caribéenne a démontré son caractère subversif et son alignement sur les intérêts des États-Unis.
Parmi les preuves présentées par La Havane figurait l’enregistrement d’une conversation de Yunior Garcia, l’un des principaux artisans de la manifestation, avec Ramón Saúl Sánchez, membre d’organisations terroristes comme Omega-7, Alpha 66, entre autres.
Au cours de l’échange, Sánchez, actuel directeur du Mouvement Démocratie, basé aux États-Unis, a exprimé son soutien et son admiration à Garcia.
En outre, il lui offrait une aide logistique et de propagande dans les médias nord-américains et lui proposa la réalisation d’une flottille pour soutenir l’action déstabilisatrice.
Le Gouvernement a également mentionné les liens de Garcia et du cubain Manuel Cuesta, également promoteur de la marche, avec le Centre pour l’ouverture et le développement de l’Amérique latine (Cadal), dont le siège est en Argentine.
Cette organisation a reçu de la Fondation nationale pour la démocratie (NED, basée aux États-Unis) un financement de 107 000 dollars en 2017 et 100 000 dollars en 2021 pour le projet « Une approche régionale pour promouvoir les valeurs démocratiques à Cuba ».
Garcia et Cuesta ont participé en 2018 au projet « Temps de changement et le nouveau rôle des Forces Armées à Cuba », organisé par le Cadal, qui abordait des scénarios possibles et des alliés pour l’avenir.
Des sources documentaires montrent que les deux Cubains ont poursuivi leur préparation en 2019 dans un atelier de l’Université nord-américaine de Saint-Louis, au sein de son centre en Espagne, où ils ont reçu des cours de Richard Youngs, expert en manifestations publiques comme méthode de changement politique, social et économique.
Le médecin cubain Carlos Leonardo Vázquez, qui pendant 25 ans a été l’agent «Fernando» des Organes de la Sécurité de l’État cubain, a récemment confirmé ces liens puisqu’il a lui-même participé avec Garcia à ces programmes de formation de leaders politiques au service d’intérêts étrangers.
Un article du site Cuba Money Project montre que l’Agence des États-Unis pour le Développement International (USAID) a accordé en septembre dernier un montant supérieur à six millions de dollars à des projets subversifs contre Cuba.
L’un des principaux bénéficiaires a été le Directoire démocratique cubain (167 500 dollars) dirigé par Orlando Gutiérrez, basé en Floride, aux États-Unis.
Dans différentes déclarations, cet homme a préconisé une intervention militaire sur l’île et soutient actuellement par de nombreuses initiatives la marche illégale à Cuba, qu’il considère comme susceptible de provoquer un changement de régime dans la plus grande des Antilles.
Gutierrez et Yunior Garcia font partie de la plateforme Cuba Proxima qui encourage la restauration du capitalisme dans la nation antillaise.
En outre, la cubaine Sailí González, l’une des initiatrices de cette tentative de déstabilisation, a récemment reconnu le soutien à cette action du directeur des Droits Humains de la Fondation Nationale Cubaine Américaine, Omar Lopez.
LES MARCHES NE SE FINANCENT PAS SEULES
Tout cela se passe sous le regard complice du Gouvernement nord-américain, et, de fait, un haut fonctionnaire de Washington a récemment menacé de nouvelles sanctions contre l’île si la marche illégale n’était pas autorisée.
Des données officielles montrent qu’entre 1996 et 2021, le Congrès nord-américain a alloué près de 404 millions de dollars aux programmes de «démocratie». Ces fonds ont été mis en œuvre par le Département d’État, l’USAID et la NED.
La loi sur la liberté et la solidarité démocratique avec Cuba, connue sous le nom de loi Helms Burton (1996), a internationalisé le blocus, codifié les programmes subversifs contre la nation et établi l’obligation d’octroyer des fonds pour leur exécution.
Le document déclare ouvertement deux composantes fondamentales de sa stratégie de guerre non conventionnelle : le siège économique et idéologique.
L’ancien ambassadeur cubain à Washington, José Ramón Cabañas, considère que la droite nord-américaine et ses connexions ont vu dans la pandémie de Covid-19 un événement similaire à la chute du camp socialiste, et ont donc soutenu toute action politique extrême et le renforcement du blocus contre Cuba.
Dans des déclarations à Prensa Latina, il a précisé que cela est également lié à la crise interne aux États-Unis : « Le gouvernement au pouvoir n’a pas de coalition forte au sein du Parti Démocrate, tout cela fait que la politique étrangère d’un parti est très peu différente de celle de l’autre ».
« C’est une administration (celle de Joe Biden) faible, incapable de comprendre et de s’approcher du phénomène cubain, qui lui fait peur d’une manière ou d’une autre, et le Parti Républicain a donc occupé un groupe important d’espaces », a-t-il souligné.
Selon Cabañas, ceux qui maintiennent une position extrême sont ceux qui sont liés à des programmes de changement de régime, financés par des organisations ayant un passé terroriste et dont les liens avec les promoteurs de la subversion sont déjà établis.
Selon le diplomate, l’extrême-droite utilise des algorithmes et des stratégies de communication sur les réseaux sociaux et les plateformes numériques avec des messages de haine répétés pour faire passer l’idée qu’il existe une communauté cubaine avec une pensée uniforme.
Pour celui qui est actuellement directeur du Centre de recherche en politique internationale à La Havane, il s’agit d’une réaction de ce secteur à la période 2015-2015 d’approche bilatérale lors de laquelle près de cinq millions de personnes ont voyagé entre les deux pays et il y a eu un recul de l’agenda réactionnaire.
Cabañas a enfin noté que la communauté cubaine avait une vision variée de ces questions et que la plupart, selon des enquêtes et des études, avaient une préoccupation commune qui est l’agenda familial.
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