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Le plan Condor a-t-il repris son vol?

Par Carmen Esquivel*

La Havane, 3 mai (Prensa Latina) De fausses accusations et des campagnes médiatiques sont utilisées contre des gouvernements et des dirigeants latino-américains pour les écarter de la vie politique dans ce que beaucoup considèrent comme une réédition du Plan Condor, car ses objectifs sont identiques mais avec des méthodes différentes.

Ce Plan Condor, aussi appelé Opération Condor, sorte de multinationale du crime, fut  appliqué dans le cône sud de l’Amérique Latine entre 1970 et 1980 par les régimes militaires, sous les auspices des États-Unis, afin d’éliminer les opposants politiques, principalement ceux de gauche.

Mais si, à l’époque, on essayait de faire taire leurs voix par des assassinats, des tortures et des disparitions, de nos jours, on emploie d’autres moyens plus détournés pour les neutraliser politiquement.

Le nouveau Plan Condor est en marche dans la région, a averti l’ancien président de l’Équateur, RafaëlCorrea, qui a expliqué que, maintenant, c’est à travers des dénonciations de fausse corruption qu’on tente de délégitimer des anciens présidents en détruisant leur réputation pour les écarter ainsi du jeu électoral.

Le cas le plus récent est celui du fondateur du Parti des Travailleurs du Brésil (PT), Luiz Inacio Lula da Silva, incarcéré par ordre du juge de première instance Sergio Moro, après qu’un tribunal l’ait condamné à 12 ans et un mois de prison pour présumée corruption, sans présenter aucune preuve, ni aucun témoin capable de l’incriminer.

L’arrestation de Lula a provoqué une vague de rejets dans la région ; des dirigeants politiques se sont prononcés contre ce procédé dont la véritable intention est d’empêcher l’ancien  président du Brésil de présenter sa candidature aux prochaines élections présidentielles d’octobre.

Jusqu’à présent, et malgré son incarcération illégale, le fondateur du PT domine les intentions de vote aux prochaines élections, avec un net avantage sur JairBolsonaro, le candidat présenté par l’extrême droite.

La persécution de Lula est une nouvelle phase du coup d’état parlementaire judiciaire ourdi par le Sénat brésilien contre la présidente DilmaRousseff, accusée d’une supposée violation des normes fiscales.

Par 61 votes en faveur et 28 contre, le Sénat a écarté du pouvoir une mandataire qui avait été démocratiquement élue par plus de 54 millions de votes.

Ce type de coup d’État « soft » ou « en douceur », ainsi dénommé parce qu’on n’utilise pas la force militaire, avait déjà été utilisé en 2012  au Paraguay contre Fernando Lugo, le président d’alors, qui fut écarté de sa charge à la suite d’un soi-disant jugement télécommandé et manipulé par l’opposition parlementaire.

Interrogé sur cette offensive contre les gouvernements progressistes en Amérique Latine, le président bolivien Evo Morales est certain que la région est confrontée à un second Plan Condor, sauf que, cette fois, les moyens employés sont des coups d’état judiciaires.

Lorsque sont élus des présidents de gauche ou des gouvernements qui s’opposent à la politique de saccage des ressources naturelles, c’est alors que survient ce type de coup d’état, écrit Evo sur son compte Twitter.

Lui-même, en tant que mandataire bolivien, s’est trouvé à l’épicentre d’une guerre médiatique, dont l’objectif était de vulnérabiliser le processus de changement.

À l’époque, on essaya de salir l’image du premier chef d’État bolivien indigène par une campagne de mensonges, et ce, malgré les profondes transformations enregistrées dans le pays depuis son accession au pouvoir.

Il suffit de constater qu’en moins d’une décade, la Bolivie est sortie de la liste des pays les  plus arriérés d’Amérique du Sud pour devenir celui qui a le plus fort taux de croissance de la région. Pendant cette période, plus de deux millions de personnes sont sortis de la pauvreté.

Le président Morales pense que Luis Almagro, le secrétaire général de l’OEA, se trouve derrière ces plans contre les gouvernements progressistes et de gauche.

« Almagro poursuit la même politique que le plan Condor. Il n’élimine peut-être pas physiquement les gouvernements anti-impérialistes, mais il veut les éliminer politiquement « ,  met en garde Evo.

Le secrétaire général de l’OEA utilise un organisme qui a des relais sur tout un hémisphère comme tribune pour attaquer le Venezuela de manière constante, pour encourager les autres pays à adopter des sanctions contre lui, à ignorer son processus électoral, allant même jusqu’à demander une intervention étrangère, comme il est apparu avec évidence lors du dernier sommet des Amériques qui s’est tenu à Lima.

Ce thème de la répétition en Amérique Latine des méthodes appliquées dans le passé pour générer le chaos et la violence et créer ainsi des prétextes pour une intervention états-unienne, a également été abordé par le président vénézuélien, Nicolas Maduro.

 » La droite vénézuélienne et celle de toute la région sont manipulées par ce nouveau Plan Condor qui veut nous faire revenir aux temps où notre pays était dominé et saccagé. Voilà ce que cherche l’oligarchie de notre pays », a déjà avertiMaduro en une autre occasion.

Pour certains experts, il existe des similitudes entre la guerre sale livrée contre la Révolution bolivarienne au Venezuela  et ce que fit au Chili, de 1970 à 1973, le quotidien Le Mercure contre le gouvernement démocratique du président Salvador Allende.

Quarante ans plus après la répression massive et les coups d’états appliqués  en Amérique du Sud, l’histoire se répète, même si aujourd’hui on recourt à d’autres moyens pour déstabiliser des gouvernements, des moyens tels que la guerre psychologique, les campagnes médiatiques, l’encouragement à la violence dans la rue et l’incitation au mécontentement et à la désobéissance sociale.

peo/arb/car

*Cheffe de la Rédaction pour l’Amérique du Sud de Prensa Latina.

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