Par Orlando Oramas Leon
Mexico, 22 novembre (Prensa Latina) Le président élu du Mexique, Andrés López Obrador, a affirmé qu’il n’y aura pas de poursuites contre les actes de corruption antérieurs à son investiture, mais il a assuré que son administration ne permettra pas la corruption. C’était là l’une de ses principales promesses de campagne.
À neuf jours de sa prise de fonction effective, cette affaire constitue un véritable dilemme pour Obrador qui estime que le pays ne peut pas se permettre de s’enliser dans les affaires de corruption qui ont, jusqu’à maintenant, envahi l’administration publique.
Qu’on en finisse donc avec cette histoire tragique et épouvantable de corruption et d’impunité. Qu’on en finisse avec cette politique antipopulaire. C’est dans l’apaisement qu’il faut débuter cette ère nouvelle, le 1er décembre, a déclaré, la veille, le président élu.
Comme auparavant, pendant la campagne électorale, et par la suite, en tant que vainqueur des élections, Obrador a répété qu’il n’y aurait pas de vengeance, ce qui a été interprété dans certains cercles comme le résultat d’un accord secret passé avec le président sortant Enrique Peña Nieto, qui a été personnellement éclaboussé par l’affaire connue comme le “scandale de la Maison Blanche”, pour lequel il a déjà fait des excuses publiques.
Cette version d’un arrangement entre Obrador et Peña Nieto a été fermement démentie par les deux intéressés, même s’il faut bien admettre que la transition d’ancien gouvernement à nouveau gouvernement doit se fonder sur le respect mutuel et la coopération.
Mais il reste encore des affaires en suspens pour l’administration qui s’en va, comme, par exemple, l’affaire de la compagnie brésilienne Odebrecht et les accusations qui pèsent sur de hauts responsables de Pemex, la compagnie des Pétroles Mexicains.
L’ASF, (“Auditoria Superior de la Federación”, la cour suprême des comptes de la Fédération) a décelé, après enquête, que Pemex avait versé illégalement, pour la seule année 2016, 950 millions de pesos (50 millions de dollars) à la compagnie de travaux publics brésilienne Odebrecht, pour qu’elle effectue des travaux dans la Raffinerie Miguel Hidalgo de Tula, dans l’État de Hidalgo.
La compagnie avait décroché ce contrat lorsque Emilio Lozoya, dont le mandat s’est achevé cette année, était à la tête de Pémex, mais un juge a déjà accordé une suspension définitive des poursuites à son encontre afin que, pour le moment, il soit impossible d’exécuter l’ordre de rendre publics les informations contenues dans l’enquête menée à ce sujet.
Selon l’ASF, les contrats litigieux en question ont été passés par Pemex Transformation Industrielle par adjudication directe, c’est-à-dire sans appel d’offre préalable, sous prétexte qu’il fallait agir de la sorte afin d’accélérer les travaux et garantir le bon fonctionnement des raffineries, raffineries qui, soit dit en passant, ont aujourd’hui le taux d’efficacité le plus bas de la planète.
“D’une manière générale, on peut affirmer que Pemex Transformation Industrielle n’a pas appliqué les dispositions prévues par la loi pour l’adjudication de ces contrats”, ont estimé les comptables chargés de cet audit.
Étant donné l’absence de procureur anti-corruption, la personne qui, à l’époque, perdit son poste, fut Santiago Nieto, le responsable des services Spécialisés dans le Traitement des Délits Électoraux (Fepade), qui enquêtait alors sur l’intervention d’Odebrecht dans la précédente campagne présidentielle qui vit la victoire de l’actuel président sortant, Peña Nieto.
Bien qu’il n’ait pu mener son enquête qu’en matière électorale, comme le précise la loi, ce juge de la Fepade, se transforma ainsi en véritable fonctionnaire anti-corruption, ce qui lui valut d’être congédié, en dépit des protestations de plusieurs groupes parlementaires et de membres de la société civile.
Il est intéressant de remarquer que López Obrador a demandé à Santiago Nieto de rejoindre son gouvernement en tant que responsable de l’Unité de Renseignements Financiers du Ministère du Logement et du Crédit Public, rien de moins.
À ce poste, il sera responsable du blanchiment d’argent, l’une des pratiques les plus courantes dans le monde de la corruption, tant à l’intérieur du gouvernement et des organes officiels que dans le crime organisé.
Il sera alors intéressant de voir qu’elle sera sa marge de manœuvre puisque le futur président affirme qu’il n’y aura pas de chasse aux sorcières concernant les délits de corruption antérieurs à son mandat.
Il va sans dire que López Obrador a insisté pour que les enquêtes en cours se poursuivent.
“Je ne suis pas un despote et je n’aspire pas, non plus, à devenir un dictateur; je suis un démocrate; aucun ordre ne sera donc donné, ni au pouvoir judiciaire, ni au pouvoir législatif; ils sont indépendants; c’est à eux de décider si les enquêtes en cours doivent être suspendues ou non ».
Mais à partir de maintenant, a-t-il insisté, il n’y aura aucun pardon pour les délits de corruption.
« Nous commençons une nouvelle étape. Il faut, qu’à partir de maintenant, aucune grâce, aucun pardon ne soit accordés aux personnes coupables de corruption et que l’on puisse juger jusqu’au président de la République et son entourage s’ils sont coupables. Il faut couper le mal à la racine. Il faut que la corruption disparaisse à jamais du Mexique », a-t-il conclu.
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