Par Rafael Calcines Armas
Santiago du Chili, 29 novembre (Prensa Latina) Le gouvernement chilien semble nager aujourd’hui entre deux eaux, car alors qu’il invite le mouvement social à dialoguer, le président insiste pour faire face à un ennemi ‘puissant et implacable’.
La veille, le ministre de l’Intérieur, Gonzalo Blumel, a reçu au palais de La Moneda (siège de l´Exécutif) une représentation syndicale de la Table d’Unité Nationale, lors de la première rencontre directe avec le mouvement populaire qui se manifeste dans les rues depuis maintenant six semaines.
La réunion, qui a duré près de trois heures, avait pour thème central la volonté des deux parties de faire progresser le dialogue, et Blumel, qui n’a pas encore donné suite aux propositions de ce qu’il est convenu d’appeler l’agenda social du Gouvernement, a promis de répondre concrètement aux demandes des organisations sociales.
Il a même estimé que ce premier contact était positif et sincère, tandis que Barbara Figueroa, présidente de la Centrale Unitaire des Travailleurs, une des participantes à la réunion pour l’Unité Socialea considéré que même si le ministre n’a pas donné de réponses concrètes, au moins il a montré de la volonté.
Pourtant, à peu près au même moment, le président Sebastián Piñera assistait à une cérémonie de remise des diplômes de la Police d´Investigation (PDI), au cours de laquelle il réaffirmait que le pays était confronté à un ‘ennemi puissant et implacable’.
Il avait déjà été avancée cette idée lorsqu’au début de la révolte sociale, il avait assuré que le pays était en guerre, ce qui avait suscité de vives critiques de tous côtés.
Il a en outre noté que la législation « pour combattre les cagoulés, les pillards, les vandales, les barricades, n’est pas suffisante », et a insisté sur la nécessité de lois plus sévères et de donner plus de pouvoirs aux forces de l’ordre et de sécurité.
L’une de ses initiatives les plus récentes dans ce sens a été de proposer au Congrès une loi permettant aux forces armées de sortir dans les rues pour ‘collaborer’ avec le corps des carabiniers à la sauvegarde d’installations stratégiques telles que celles de production d’électricité, de communications, de l´eau potable, des transports et autres.
Il a finalement appelé les nouveaux diplômés à combattre « cette criminalité sans limite qui implique aussi le trafic de drogue, les mouvements anarchiques et bien d’autres ».
Ce dernier terme, étant si général, a conduit des analystes à s’interroger s´il comprend également le mouvement social qui se manifeste dans les rues avec des revendications que le président a jugées justes, mais qui est systématiquement réprimé par les forces de police.
Une répression qui, en revanche, est souvent tardive ou inexistante lorsqu’il s’agit de mettre un terme aux pillages de la délinquance étrangères aux manifestations populaires.
Pour couronner le tout, le ministre de la Défense, Alberto Espina, interviewé par une chaîne de télévision locale, a assuré que ‘les forces armées sont prêtes s’il faut décréter l’État d’urgence’.
Puis il a précisé que « mettre les militaires dans la rue pour contrôler l’ordre public, est une décision qui signifie limiter les libertés des personnes. C´est surtout une décision complexe et difficile. Mais s’il le faut, le président le fera ».
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